De la lutte biologique …
Depuis des millénaires, l’homme utilise d’autres animaux pour se protéger d’organismes nuisibles. Durant l’Antiquité, ce fut le chat, vénéré en Égypte, qui a été élevé pour protéger les denrées alimentaires contre les attaques des rongeurs.
Plus récemment, au xixe siècle, René-Antoine Ferchault de Réaumur, physicien et naturaliste français, fit des recherches sur quelques auxiliaires, dont un névroptère, pour protéger les plantes des attaques de pucerons.
Dans les années 1970, fut développée la lutte biologique, c’est-à-dire l’utilisation et le commerce d’organismes vivants ou de leurs produits pour empêcher ou réduire les pertes ou dommages causés par des organismes nuisibles. Mais elle est souvent utilisée en milieu protégé, sous abri (serres, tunnels, etc.), les auxiliaires utilisés peuvent être indigènes ou exotiques. Mais comme ce milieu est artificiel et pauvre en habitats, ils ne trouvent pas les autres éléments nécessaires à leur cycle de vie complet. On doit donc réaliser des lâchers régulièrement. La lutte biologique présente également l’inconvénient d’introduire des espèces exotiques, comme ce fut le cas avec la coccinelle asiatique (Harmonia axyridis), avec le risque qu’elles s’échappent.
Que faire toutefois pour protéger les cultures en plein champ ? Faire des lâchers est économiquement impensable surtout si l’on s’acharne à vouloir lutter contre les phytophages compétiteurs.
En plein champ, si l’on souhaite diminuer l’utilisation des pesticides, le regard sera différent puisqu’il faudra accepter la présence de ces phytophages et que l’on cherchera plutôt à contrôler leurs populations sous le seuil théorique de nuisibilité. Ainsi, pour protéger les cultures à l’aide d’auxiliaires sauvages, on parlera plutôt de contrôle biologique par conservation, c’est-à-dire la gestion du paysage et des habitats des espèces indigènes afin de les attirer et de les maintenir dans les écosystèmes. Ces habitats peuvent être des sites d’alimentation, de reproduction ou d’hivernage. Ils sont essentiels pour les cycles biologiques complets de ces auxiliaires. Dans cette démarche alternative de protection des plantes, la biodiversité joue ainsi un rôle essentiel
… à la biodiversité fonctionnelle
La biodiversité fonctionnelle a un impact positif sur la production agricole sur les plans écologique, économique et social des exploitations, des filières et des territoires. En d’autres termes, elle est utile à l’agriculteur car elle a une fonction qui l’intéresse : protection des plantes, pollinisation, dégradation de la matière organique dans le sol et dans l’eau…
À l’échelle de la parcelle agricole, c’est l’agriculteur qui est acteur de la gestion et de la conservation de la biodiversité. Il s’agit pour lui de mettre en place des aménagements agro-écologiques (haies, bandes fleuries, couverts végétaux, etc.) et d’installer des zones de régulation écologique afin d’avoir des auxiliaires et des pollinisateurs qui aillent directement sur les cultures visées.
À l’échelle du territoire, la biodiversité se traduit en termes de diversité du paysage. Selon un type de paysage dans une région donnée, on aura un peuplement herbacé et animal particulier. À cette échelle, l’agriculteur ne peut pas travailler seul, il doit collaborer avec les agriculteurs voisins, les associations et les collectivités.
Pour en savoir plus

Cet ouvrage présente la biodiversité utile à la protection des cultures : quelles sont les espèces les plus intéressantes, quels sont leurs rôles et quels sont leurs besoins bioécologiques ?
Des conseils simples vous sont apportés pour pouvoir préserver et enrichir les auxiliaires en quantité et en diversité jusqu’au centre des parcelles : quelles sont les essences et les espèces floristiques les plus attractives et pourquoi ? Quelles sont celles à éviter ? Comment les insérer dans les agroécosystèmes ? Vous trouverez aussi des clés pour aider l’agriculteur à savoir quand traiter, en prenant en compte la présence des auxiliaires.
Ce guide pédagogique est destiné avant tout aux agriculteurs afin qu’ils puissent devenir autonomes dans la gestion et l’aménagement de leur exploitation et réduire les pesticides. Il intéressera également ceux qui les accompagnent : les conseillers et les animateurs agricoles.
Nos recherches sur la biodiversité fonctionnelle
Thierry D., Deutsch B., Paulian M., Villenave J. & Canard. M., 2005 : Quantifying biodiversity in ecosystems by green lacewing assemblages. I. A valuable method to do (Insecta: Neuroptera: Chrysopidae). Agronomy for Sustainable Development 25: 473-479.
Villenave J., Thierry D., Al Mamun A., Lodé T. & Rat-Morris E. 2005 : The pollens consumed by Chrysoperla lucasina and Ch. affinis (Neuroptera: Chrysopidae) in cabbage crop environment in western France. Aphidophaga 9 Proceedings. European Journal of Entomology 102 (3): 547-562.
Villenave J. & Rat-Morris E., 2007 : Comment favoriser la présence des chrysopes. Bulletin semences, 196 : 32-34.
Villenave J., Gil F. & Rat-Morris E., 2007 : Essai de contrôle biologique contre les pucerons sur cultures de fraises par l’hémérobe Micromus angulatus (Stephens). Fruits et Légumes, 265.
Villenave-Chasset J. & Mafayon C., 2010 : Les insectes auxiliaires des cultures et d’élevage. Alter Agri 103 : 13-15.
Villenave-Chasset J. & Hécker C., 2010 : Les Chrysopes des platanes à Angers. Horticulture & Paysage. Septembre.
Villenave-Chasset J. & Denis A., 2013 : Etude des pollens consommés par les Chrysopes (Neuroptera, Chrysopidae) et les Syrphes (Diptera, Syrphidae). Symbioses 29 : 17 – 20.
Canard M., Danflous S., Giacomino M., M.,Thierry D. & Villenave-Chasset J., 2013 : Troisième complément à la cartographie des Chrysopes en France (Neuroptera, Chrysopidae), R.A.R.E. 23 (1) : 2-11.
Villenave-Chasset J., 2013 : Des fleurs en ville pour les insectes auxiliaires, oui, mais quelles fleurs ? Revue Scientifique Bourgogne Nature 18 : 140-147.
Villenave-Chasset J. et Caldumbide C. : série de 7 articles « Auxiliaires Indigènes ». Le Lien Horticole • avril 2013 à janvier 2015.
Nos contributions
Trottin-Caudal Y. & Villeneuve F., 2006. Reconnaître les Auxiliaires, Légumes et Fraises sous serres, abris et en plein champs. Ctifl, 125pp.
Gretia, 2009. Etat des Lieux des Connaissances sur les Invertébrés Continentaux des Pays de la Loire. Bilan Final.
Birault D., 2010 : Hostellerie des insectes auxiliaires. Horizon 74 : 27.
Lorgnier Dumesnil de, C., 2011. Insectes pour un Jardin Ecologique. Editions De vecchi. Préface de Johanna Villenave-Chasset.